Voilà, ça commence là… où il n’y a que grisaille… La vie semble s’en être allée dans un autre monde, il ne reste que le sommeil et la mort. Tout vit au ralenti, emmitouflé dans une sorte de brouillard où ne peut qu’exister froid et humidité. Le soleil parfois montre un rayon, bien pâle, si peu réchauffant, comme à des millions d’années lumière de nous.
Et puis, un matin ou bien un soir, un frémissement, une onde vient nous surprendre dans ce qui est devenu notre train-train quotidien. De quoi peut-il bien s’agir ? C’est à peine perceptible, léger comme un frôlement au point qu’il faut être vraiment attentif pour s’en rendre compte. La vie vient de passer en un instant. La nature ouvre un œil et sourit à la vie, juste le temps de cet instant éphémère, en communion avec elle.
Mais aussitôt, tout redevient comme avant, le froid, la neige, la pluie, les nuages… Tout est pareil et pourtant il y a comme une différence, le jour qui se lève plus tôt, les oiseaux qui pépient plus gaiement, mais toujours le froid et la pluie, le gris… mais peut être un gris plus blanc, plus coloré. La vie est passée par là, et elle a tout changé. C’est ainsi qu’un matin, nous ouvrons nos volets et nous découvrons le fruit de la communion entre la vie et la nature.
C’est incroyable ! La vie reprend ses droits. Hier encore, il n’y avait que branche morte, et aujourd’hui, un bourgeon est prêt à éclore, et nous n’avons rien vu, rien entendu, rien compris, tous autant que nous sommes, embourbés dans une vie que nous nous sommes créés avec nos lots de soucis, d’épreuves et de stress.
Alors voilà, la vie s’est unie à la nature, comme elle nous a proposé cette union. L’avons-nous acceptée ?
La vie, dans un mouvement fluide et rempli d’énergie, arrive dans chaque bourgeon, fait éclore la beauté qui sommeillait en lui, jusqu’à l’explosion des sens : odorat, vue, toucher, ouïe, et goût, tout y est. Le monde s’est réveillé, prêt à repartir de plus belle dans sa vie, de la plus infime à la plus grande, tous solidaires de notre planète pour la faire grandir, pour la rendre belle, pour lui donner la joie et la paix. Lui vient à Elle, et de leur rencontre, que naîtra-t-il ?
L’heure n’est pas à la spéculation, quel vilain mot par ailleurs. Non, l’heure est au spectacle enchanté, féérique que Dame Nature nous offre, dans un bel élan de générosité, car oui, tout est offert, donné à qui veut bien recevoir. Et celui qui reçoit donne à son tour, dans un échange qui nous vient de la nuit des temps et qui se terminera le soir de tous les temps.
Chaque jour n’est pas identique au précédent, tout évolue, tout grandit, chacun à son rythme et le tout formant une symphonie merveilleuse, dont le chef d’orchestre ne pourrait être que fier. Il n’y a pas de fausse note, excepté celle que nous mettons, nous les hommes (je pense à la marée noire en ce moment), mais parfois quelques hommes s’ingénient à effacer ces fausses notes, et ils y réussissent, pour le plus grand plaisir de Dame Nature. Le temps passe et chaque jour apporte son moment de plénitude, de sérénité, de beauté. Si les fleurs se fanent, c’est qu’elles laissent leur place.
Il peut à nouveau pleuvoir, les fruits n’en seront que plus juteux, mais il fait de plus en plus beau. Le soleil se montre ardent, et les fruits se chargent en sucre. Il ne reste plus qu’à prier pour qu’il n’y ait plus de soubresauts de l’hiver pour qu’il n’emporte pas avec lui les si beaux fruits qui sont à venir. Le froid passe mais les fruits ne trépassent pas, merci Dame Nature ! Merci la Vie !
C’est alors que la nature se fait tentation, avec la complicité de la vie, sans qui rien ne serait arrivé… Oui, tentation, c’est le mot juste ! Chaque arbre veut avoir descendance, chaque plante, chaque animal… C’est inscrit dans le livre de leur vie. Alors tout est fait pour y arriver et tous les moyens sont bons (qui a dit que le commercial est le propre de l’homme ?)
Dame Nature pare ses fruits d’une couleur irrésistible pour que chaque être vivant possédant un estomac soit irrésistiblement attiré par eux. La couleur, la brillance, l’effet bonne mine et gage de bonne santé, le jus, l’odeur, le parfum… Tout, elle mise sur tout ! Et ça marche…
Qui peut résister à un tel étalage ? QUI ?
Pas moi, en tout cas…
Que va-t-il arriver à ces pauvres cerises ? Rien de moins que leur destin, celui pour lequel elles sont nées, ont grandi, ont mûri…
Mais si elles n’ont vécu que pour que je puisse savourer leur chair tendre et acidulée, elles sont nées pour que leur noyau, petit arbre à fruits en devenir, soit planté à nouveau dans la terre…
Espoir d’une nouvelle vie !
(et de nouvelles cerises à déguster !! miam miam !!)